Friday, December 01, 2006

Dans la rue

Conduire a Beyrouth sollicite tellement la vision périphérique que je commence a comprendre la façon dont les mouches volent. Le nombre de panneaux, la foultitude de formats, leur anarchique et agressif agencement, perturbent grandement ma concentration et rendent leur perception mais aussi celle des voitures autour proprement subliminale.

Les campagnes lan nansa, badna n3ich, i love life etc., déclinées dans toutes les langues du pays (o tv a même un panneau en arménien), accrochées sur des billboards qui tournent, se succèdent les unes aux autres, dans des raccourcis purement libanais : sur la route de l’aéroport, Nasrallah la main levée vers le ciel a l’air de caresser la croupe d’une chanteuse languide affalée sur un canapé, 3 panneaux plus loin….

Hier, pourtant la veille d’une grosse journée de manif etc., l’absence de dispositif militaire en ville était un peu interloquante. La semaine passée, pour les obsèques de pierre Gemayel il y avait des la veille 6 tanks postes sur le ring, et autant du cote du nahar (deux extrémités de la place aux mille noms). Il y a moins d’une semaine, il a fallu déployer l’armée place sassine pour régler un différent portant sur la taille d’une photo. Est-ce que dans d’autres pays aussi on se bat pour mettre la photo d’un vivant plus grande que celle du mort tout frais de la veille ?
Lan nansa, mais quand bien même on le voudrait on ne le pourrait pas, j’ai suffisamment vu les voitures de chacun des martyrs de ces deux ans pour réécrire le rapport balistique. J’ai entendu la plupart des explosions, avec toujours la même pensée magnifiquement conne : c’est un immeuble qu’on détruit… pour la 60eme fois cette année, je vais passer une journée a entendre la tele malgré moi. 16% de mon année 2006 a été fait de la même inquiétude sourde, du même dégoût impuissant. De la même scène : je marche a contre courant d’une foule équipée de drapeaux sales que le vent envoie dans les figures. En pestant.