Monday, February 26, 2007

mission accomplie?




Hier, pendant que dehors la ville grésillait, ces deux petites lampes ont commencé à avoir une existence bien à elles, et je me suis sentie bêtement émue comme une maman à une remise de diplômes.

Dehors, après la pluie, mon écharpe rouge et blanche de indépendance 05 vire au gris, et se balance lourde et molle devant un panneau i love…. (el samak le poisson – el hayett la vie - el carpets les tapis – el nyeke la baise….) 07.
Dans la perspective qui les sépare, ces deux ans deux panneaux, une église une mosquée treize grues et une voie d’accès à la ville qui me sert de baromètre circulationnel les jours d’événements.
Et mes lampes, qui vont demain changer de maison.



Thursday, February 22, 2007

Silence

Je ne sais pas ce que j’ai, ça fait quelques jours que je n’ai pas envie de parler.
C’est peut être du à cet affreux rhume qui me colle depuis dimanche. Au téléphone c’est tellement impressionnant que j’en abuse un peu pour que les choses aillent plus vite…. ceci dit, les petits vertiges migraineux qui m’assaillent depuis ce matin ne sont pas si simulés… peut être aussi c’est la faute à ce tournage catastrophe de mardi, on a tout eu, pas de visa, plus de camera, des accidents avant pendant et après, ça m’apprendra aussi à ne jamais être trop précise….
Peut être aussi que la découverte de colis presque piégés au petit déjeuner – et le fait que l’information toute pleine d’inexactitude soit répétée partout et lestée à chaque énonciation d’encore une approximation de plus - cette espèce de mastication de la rumeur, d’élongation étiratoire repue y est pour quelque chose.
Peut être aussi les travaux de démolition d’une très jolie maison des années 30, en face de mon bureau, me minent t ils un peu le moral – en plus d’achever de ruiner mon ouie, déjà agressée klaxoniquement tous les après midis par les chauffeurs de camions qui ne voient pas à temps l’étroitesse de notre rue et sont persuadés qu’en forçant ils passeront…

Je ne vais pas remonter jusqu'à la semaine passée – attentat matinal sordide + commémoration & drapeaux + orage à la violence sonore toute israélienne – pour expliquer ma fatigue, parce que je ne veux pas me souvenir du nombre de fois ou j’ai dit : on est un peu en suspens la – on attend de voir – mieux vaut ne rien prévoir demain - non ne viens pas ce n’est pas prudent de traverser la ville… fais attention à tes roues - allah ma3 dawalibak (que dieu soit avec tes roues : se dit quand quelqu’un se prépare à faire un long trajet en voiture) a-t-il jamais eu un autre sens ?
En fait je sais ce qui me chiffonne par dessus tout : ce matin, on devait me livrer des étagères, cadeau de mes 30 ans, à 9h00. A peu près l’heure à laquelle une caisse en bois contenant du matériel explosif (on notera le vague de la description) a été trouvée, manque de chance, apparemment sur le trajet dudit livreur. Le van a été immobilisé – fouillé par la police ou l’armée, et je n’ai pas eu mes étagères. Encore une fois, ce qui se passe dans le pays bouleverse ma minuscule existence et je trouve que c’est plus qu’assez.

Tuesday, February 06, 2007

apres la pluie?

L’autre soir, avec mon petit frère, on s’est demandé à quoi tenait notre patriotisme. Qu’est ce qu’on aime vraiment au Liban qu’on ne pourrait trouver ailleurs? Les beaux paysages, les falaises qui plongent dans la mer ? Trop tard. Tout ce qui reste c’est des montagnes crevassées de carrières, lacérées d’asphalte, purulentes de ciment, leur seul lien à la mer c’est les égouts.
Oui mais Beyrouth. Parlons en: entre deux grues et un parking, il reste certes quelques arcades, reconstituées à l’identique en béton armé, et des voitures des voitures des voitures et pas assez de place pour elles…
Les quelques coins encore un peu sauvages du pays sont plus que menacés par une urbanisation encore plus sauvage qu’eux, ou tellement enrichis d’uranium appauvri qu’il vaudrait mieux en faire don à des labos de recherche atomique… à un moment on a aimé la liberté, la folie téméraire, l’absence de limites de ce pays en définition, l’exagération et la vitesse de notre vie ici. Entre le Babylone et la fac on allait à la découverte de chaque impasse de la ville, en plus à ce moment la les routes n’arrêtaient pas de changer, le centre ville était un monstrueux mille feuilles en chantier, on « faisait des tours en voiture » partout et encore plus loin… la gourmande agitation de ces jours la me manque.

Quelques jours plus tard, alors que j’essaie d’organiser quelque chose de « chouette » pour mes 30 ans, je m’aperçois que mes choix tiennent compte des ponts détruits, et des embouteillages afférents, que je n’ai pas envie d’infliger à mes amis. Etouffement. D’ailleurs ai-je bien envie de faire la fête ?


Les orages d’hier et d’aujourd’hui glacent le ciel et le vent, inondent mon appartement - éparpillement de serpillières - et font bien rentrer dans le sol toutes ces poussières qui croupissaient, hésitantes, dans l’atmosphère grise des derniers jours. Curieusement, c’est le moment où la ville est la plus jolie, masquée par la densité de la pluie, délavée et cotonneuse, elle se laisse emmitoufler par les torrents d’eau et les coups de tonnerre métalliques et flamboyants.